Communiqué
Comme le gouvernement colonial états-unien a créé des réserves d’Indiens après avoir détruit consciencieusement leur environnement, massacré les troupeaux de bisons et les Indiens eux-mêmes, voilà le Parc Naturel Régional des Ballons des Vosges qui s’inspirant de ce glorieux passé tente, à son petit niveau certes, et avec des moyens sans commune mesure, de créer des réserves pour écologistes pacifiés, dans le double but de leur offrir un hochet à agiter et de masquer derrière une prétendue sollicitude pour la préservation de la nature, ses véritables objectifs dont l’origine commune est le développement touristique à outrance.
Le Parc a donc, dans un grand déploiement de moyens, organisé le 29 novembre une « journée d’études » pompeusement intitulée « Quiétude attitude ». Les objectifs affichés au nombre de trois sont :
– Communiquer sur l’existence de zones de quiétude à l’échelle du territoire du Parc.
– Présenter les bons réflexes à adopter pour préserver la tranquillité de la faune sauvage.
– Mobiliser les professionnels du tourisme et des loisirs pour assurer un relais vers le grand public.
On l’aura compris, rien d’autre que de la communication et de l’emballage marketing pour justifier toutes sortes d’activités qu’on souhaite développer, et faire prospérer dans des zones naturelles fragiles.
Y étaient invités toutes sortes de représentants aux responsabilités écrasantes issus des mouvements sportifs et de loisirs ainsi que, pour faire bonne mesure, des écologistes défenseurs de la nature. Ces derniers, sans doute échaudés par les pratiques désormais habituelles de la direction du parc, n’avaient semble-t-il, pas daigné faire le voyage en nombre jusqu’à La Bresse, lieu d’élection de cette journée qui, si l’on s’en tient au programme sur papier glacé abondamment distribué, devait constituer un moment fort d’échanges et de concertations.
Cette journée donc, après avoir été introduite comme il se doit par les discours successifs, mais néanmoins parsemés des navrantes et habituelles banalités, du Maire de la commune, du Président du Parc et de quelques-unes des importantes sommités invitées, se poursuivit par la présentation du morceau de choix, le plat de résistance, la présentation du programme « Quiétude attitude » résultat de l’étude commandée par le Parc et réalisée par un cabinet spécialisé dans la production de présentations « power point » au graphisme accrocheur et de slogans non moins agressifs, produits de la réflexion de chargés d’études, diplômés d’écoles de commerce et de marketing.
C’est ainsi qu’au titre du programme à l’originalité décoiffante « Quietude attitude » fut associée une devise en guise de sous-titre, au nom au moins aussi époustouflant : « Sauvagement responsable ».
Tout commentaire serait à ce point, superflu, et nous n’en ajouterons donc aucun !
De la même manière il est inutile d’évoquer le contenu de cette étude, car c’est simple il n’y en a pas. Sinon une compilation d’éléments connus et reconnus, recopiés et alignés sans vergogne, agrémentés de recommandations aussi élémentaires que : « Attention ! Les pratiques du camping et du bivouac sont réglementées dans certains espaces protégés ».
Nous n’évoquerons pas non plus ici le coût, inversement proportionnel au contenu, de cette si considérable étude !
La matinée se conclut par l’inauguration du site internet, moment paroxystique soutenu par l’enthousiasme collectif.
Bien entendu les ateliers qui ont suivi et conclu la journée n’étaient là que pour donner l’impression d’une large concertation des acteurs, comme aime à le clamer la direction du Parc. En réalité le « programme d’action » est depuis longtemps établi et arrêté. Il se résume en quelques mots, comment donner bonne conscience et un vernis de protecteur de la nature aux associations sportives et de loisirs qui veulent développer leur présence et leurs activités sur le massif, considérant ce dernier comme un espace de jeux artificiels où tout ou presque doit être permis. Les activités en question allant de la randonnée aux manifestations motorisées sans autres précisions !
La consultation studieuse du site internet nous apprend que les « recommandations » du programme relatives à l’organisation de manifestations, n’apportent aucune contrainte supplémentaire que celles prévues et décrites dans les textes réglementaires habituels régissant ces activités, et leur sont en tous points identiques.
Les professions de foi des « ambassadeurs », quant à elles, sont en phase avec le programme, creuses, et profondément navrantes.
Au moment où les conséquences toujours plus préoccupantes du réchauffement climatique nous imposent de revisiter radicalement notre relation à la nature, le Parc s’engouffre dans une campagne déguisée de promotion des activités de masse dans les zones naturelles.
Cette opération de communication de la direction du Parc révèle, s’il en était encore besoin, l’état de profonde déliquescence des principes qui présidaient à l’origine de la création des parcs naturels. A ces principes se substituèrent à petites touches, jusqu’à les remplacer totalement, la soumission aux lobbys, à l’air du temps et l’adoption des valeurs de la consommation et du tourisme de masse.
La question vaut donc aujourd’hui d’être posée, le Parc a-t-il encore une parcelle de légitimité à exister en tant que tel ?
Ne serait-il pas plus rationnel afin qu’il assume sa véritable vocation, qu’il fusionne avec les offices de tourisme départementaux ?
La réponse à cette question lors d’une prochaine initiative de SOS Massif des Vosges.
La Bresse le 04 décembre 2018
Dominique Humbert
Président